samedi 14 juillet 2007

14 juillet

Je me souviens d'un 14 juillet, il y a longtemps ; j'avais entre 20 et 23 ans, puisque c'était quand j'étais à l'université. Je passais mes vacances d'été à sillonner la région en voiture, seul, fuyant ou au contraire cherchant quelque chose que j'aurais été bien en peine de nommer. Mais ce 14 juillet-là, je ne roulais pas au hasard ; j'avais rendez-vous avec mes parents, qui m'avaient fait inviter avec eux à un repas chez des gens que je ne connaissais absolument pas et qui vivaient dans un village perdu de la Meuse ; le genre de village dont on a aucune chance d'entendre parler si l'on a rien à y faire. C'était comme souvent les villages lorrains une rue unique, bordée d'anciens corps de fermes mitoyens, assez bas. Une impression de délabrement et de pauvreté s'en dégageait. Le trafic automobile était absolument nul – il était midi et demi – et aucun passant ne se faisait voir dans la rue. Vers la fin de la commune, sur quelques centaines de mètres, les vieilles maisons cédaient la place à des pavillons plus récents, plus espacés, séparés par des pelouses et des haies ou des clôtures. Là aussi, aucun signe de vie. Aucun bruit, aucun mouvement. Le village tout entier, je l'avais noté en passant, était livré aux durs rayons du soleil, puisqu'aucun arbre n'était planté le long de la chaussée. Il n'y avait pas non plus de forêt au loin, ni aucun élément de décor agréable ou pittoresque ; seule la plaine, assez plate, et infinie. Tout cela donnait une impression déprimante de dénuement. J'avais oublié l'adresse où je devais me rendre et, après m'être garé au hasard, j'avais passé vingt bonnes minutes à parcourir le village du début à la fin, deux ou trois fois – jusqu'à ce que ma mère, me voyant sans doute par une fenêtre, sorte d'une maison pour me faire signe. La maison était agréablement décorée, chaleureuse, accueillant une famille manifestement plutôt aisée sans rien avoir du vulgaire « nouveau riche ». De nombreux autres habitants du village étaient là ; manifestement, ici, la notion de communauté était encore une réalité, on avait pas le moins du monde affaire à un village dortoir. On m'avait rapidement glissé une flûte de champagne dans la main (mais qui fête réellement le 14 juillet, au fait ? qui étaient ces gens pour qui tout cela a encore un sens ?) et j'avais passé finalement une agréable journée, me disant que si la nature aime à se cacher, la vie sociale, la vie communautaire aussi ; les campagnes ne sont peut-être pas aussi mortes et anonymes qu'on le pense quand on les traverse comme étranger. Elles se protègent de nous, tout simplement.

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